MESDAMES, MESSIEURS,
En quelques mots courts, comme un adieu, je voudrais apporter un suprême hommage, un dernier salut à nos héros tombés au Champs d'Honneur.
Mais auparavant il m'est un devoir très doux de remercier tous ceux qui ont contribué au succès de cette cérémonie :
Je ne peux pas non plus oublier les membres du personnel enseignant, à qui je n'ai jamais fait appel en vain, chaque fois qu'il s'est agi de notre grande oeuvre patriotique.
Fièrement érigé au milieu de ces maisons qui furent leurs berceaux, à l'abri du vieux clocher natal, au milieu de ce jardin qui fut le théâtre de leurs premiers ébats, ce monument est désormais vôtre. Il est à vous, parents qui pleurez un être cher, il est à vous qui fûtes les camarades de combat et de souffrances de ces braves ; il est à vous surtout, enfants qui devez garder au coeur toujours le souvenir du sacrifice ; il est aux générations qui montent et qui se transmettront le flambeau.
Que ces pierres soient pour nous désormais sacrées. Si elles n'abritent pas les dépouilles de nos morts, elles gardent à jamais leur mémoire, elles symbolisent leurs vertus les plus hautes. Ces noms qui brillent en lettres d'or dans ce marbre, nous les confondons tous dans les mêmes rayons. Ils sont tous grands, ils sont tous beaux, ils disent avec une douloureuse éloquence quelle fut leur bravoure. Aussi ce monument sera-t-il pour nous, la plus intime, la plus touchante, la plus sacrée des pages de notre histoire.
Malgré les voiles du deuil, malgré la marche funèbre, c'est pour une fête que nous sommes réunis : la Fête du Souvenir, la Fête de l'Espérance et surtout la Fête du Coeur. Oui, une Fête car les morts dont le souvenir nous rassemble ne sont pas comme les autres ; ils sont si grands, ils sont tombés pour une si noble cause, qu'il ne suffit pas de les pleurer, il faut les célébrer. Des larmes dans les yeux sans doute, mais aussi des palmes dans la main. En ce jour tout ceux qui sont tombés, ont droit à la même reconnaissance, au même amour, nous les enveloppons de la même poignante affection. Tous ont servi la cause sacrée de la libération, riches et pauvres, savants et illettrés, grands chefs et modestes poilus ne se distinguent plus devant notre piété reconnaissante ; la mort les égalise. Et avec eux nous saluons toute notre grande armée, combien de tombes n'auront pas leur place dans nos cimetières !...
Là-bas, plus ou moins loin, au-delà même de nos mers, il y aura des dépouilles irrecouvrées, ne les oublions pas ; associons les au suprême hommage que nous rendons, hommage d'autant plus grand, que tout en restant familial, il reste union sacrée, en un mot il reste Français.
Grands morts héroïques de la Patrie, je vous salue et je vous pleure.
Pauvres mères !... pauvres pères !... pauvres femmes !... pauvres soeurs !... pauvres vieillards !... pauvres enfants !... Vous aviez votre espérance dans ces jeunesses, si robustes, et la plupart d'entre vous n'ont pas même la consolation d'avoir un coin de terre pour arroser de leurs larmes, les restes de celui que vous pleurez. Mais rassurez vous, ils n'ont pas froids ces chers ensevelis, ils dorment sur le coeur de la France. Dans un enveloppement très doux, elle étend sur eux les plis de son manteau, ils ne sont pas abandonnés.
Salut à vous tous nobles héros de Kléber, c'est grâce à votre courage, à vos efforts, à vos souffrances, à votre héroïsme que nous pouvons transmettre à nos descendants le patrimoine de beauté que nos anciens nous ont légué. Vous avez fait la France plus grande, plus belle, et plus respectée. Vous nous avez donné la Victoire, à Vous notre admiration et notre gratitude infinie.
Gloire à notre France immortelle.
Gloire à ceux qui sont morts pour elle.
Mesdames, et Messieurs en votre nom et au mien, je salue nos grands morts.
KLEBER le 4 juin 1925
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